Sur la place principale du village, dans le cimetière ou dans l’église, à deux pas de la mairie, au sein des écoles… Les monuments aux morts font partie du paysage, à tel point que, bien souvent, on ne les remarque plus. Pourtant, en Maine-et-Loire comme ailleurs, ils disent une époque, un contexte, une histoire politique, sociale, économique et religieuse.
Quelque 400 monuments aux morts ont été érigés dans la quasi-totalité des communes de Maine-et-Loire, essentiellement entre 1920 et 1922. Comme le rappelle Élisabeth Verry, directrice des Archives départementales, « ces monuments dans leur acception actuelle sont une invention de 14-18, il y en avait très peu auparavant. Ce n’est pas tant le fait que les soldats sont morts qui est célébré que le fait qu’ils sont morts pour la France ». Pour réaliser cet ouvrage, l’équipe scientifique réunie autour d’Élisabeth Verry s’est appuyée sur une large étude publiée il y a 20 ans par un groupe de bénévoles dans le cadre de l’Université du temps libre : mobilisés sur le terrain, ils avaient recensé les monuments aux morts du département.
À Noyant, la Marianne en pleurs a été réalisée par le sculpteur Henri Karcher.
« Mémoires de pierre » a repris ce travail, enrichi d’un approfondissement iconographique très éclairant. Il accompagne un inventaire photographique complet des édifices du département.
« Les monuments ont l’air de se ressembler, mais ils ne se ressemblent pas, avance la directrice des Archives. On dégage nettement les différentes typologies : des symboles chrétiens, patriotiques ou républicains, apparaissent sur un grand nombre, qui reflètent les courants de pensée de ces années d’après-guerre. »
400 monuments aux morts érigés en Maine-et-Loire
Parfois, comme à Trélazé, c’est la très longue absence de monument aux morts qui interpelle, alors que l’usage s’était imposé partout en France, s’appuyant sur la loi du 25 octobre 1919. Pas question à l’époque, pour une majorité pacifiste, d’ériger un monument rappelant la guerre. D’un point de vue plus prosaïque, c’est bien souvent l’étendue des moyens financiers d’une commune qui a présidé au choix du monument aux morts. Si beaucoup ont ainsi été achetés « sur catalogue », d’autres sont l’œuvre d’artistes de premier plan, tels Jules Desbois à Angers ou Eugène-Henry Karcher à Noyant. L’emplacement choisi crée parfois des dissensions, comme au Lion-d’Angers, où deux positions irréconciliables ont abouti à l’érection de deux monuments. Plusieurs ont assez régulièrement été déplacés depuis leur installation – du cimetière à la place publique – ou reconstruits avec une autre tonalité, plus pacifiste, comme ce fut le cas à Chalonnes-sur-Loire, en 1998.
Au Fief-Sauvin, le monument aux morts réunit un poilu et un Vendéen.
Porteur d’histoire et de sens, « Mémoires de pierre » a aussi vocation, pour Élisabeth Verry, « à réactiver l’intérêt des Angevins pour leurs monuments aux morts, afin qu’ils soient conservés et valorisés, notamment dans les plus petites communes. Du point de vue républicain et citoyen, ce serait dommageable qu’ils s’effacent de notre paysage. Ils sont importants dans tout ce qu’ils ont d’universel. »
Comme ici à Vihiers, le Département sensibilise les collégiens à l’histoire de la Grande Guerre.
« Mémoires de pierre » est disponible aux Archives départementales et en librairie au prix de 26 €. Pour 40 €, il est possible de coupler l’achat de l’ouvrage et celui de « L’Anjou dans la Grande Guerre ». Une déclinaison du livre sous forme d’exposition est visible aux Archives jusqu’au 1er mars 2019.
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